Intervention de Michèle Bonneton à la convention éducation
Les tables rondes ont été d’une grande qualité. La première a porté sur l’innovation pédagogique, avec des représentants du Projet Educatif Local de la ville de Voiron, de l’école alternative Primevere de Gillonay, et du CLEPT de Grenoble (College et Lycée Elitaire Pour Tous).
La 2eme a réuni, sur le thème de la reconstruction de l’Education Nationale, des représentants des partis de gauche:
– pour le Parti Communiste, François Auguste
– pour le Parti de Gauche, Alain Dontaine
– pour le Parti Socialiste , Arlette Gervasi
– pour les Alternatifs, Bernard Macret
– pour EELV, Philippe Merieu.
Au delà de quelques divergences sur des points de détails, l’ensemble des participants s’est entendu pour dénoncer la démolition de l’Education Nationale organisée par le gouvernement actuel depuis 5 ans, et la nécessité d’inverser le processus. Une communauté de vues stimulante dans cette période électorale.
Nous publions ci dessous l’intervention de Michèle Bonneton au cours de la Convention, qui résume bien les différents points abordés au cours des 2 tables rondes.
« Nous venons d’entendre comment des innovations de fond pour l’éducation ont pu être mise en place et perdurer. Ces innovations reposent toutes sur :
– Un questionnement sur l’école,
– Le désir d’apprendre des jeunes, comme moteur fondamental
– Le travail en équipe : co-animation, co éducation, co construction des projets dans des lieux de parole
– La valorisation du jeune en tant que sujet , tel qu’il est dans sa globalité, avec ses échecs et ses réussites.
– Faire en sorte que le jeune soit auteur de ses savoirs ; ceci dans l’interlocution avec des référents.
Ces expériences sont très importantes pour améliorer le système éducatif, pour mieux l’adapter aux élèves et aux évolutions de la société.
Je félicite très chaleureusement leurs auteurs parce que je sais combien toute innovation est difficile dans notre système éducatif trop lourd.
Notre école va mal.
Les enseignants sont malmenés et sont confrontés à une diminution de leurs effectifs.
66000 postes ont été supprimés dans l’Education Nationale par le gouvernement actuel depuis 2007, auxquels s’ajoutent 14000 suppressions de poste prévues pour la Rentrée 2012, et ce, alors que le nombre d’élèves augmentent : il y aura 34000 élèves de plus.
Dans la seule académie de Grenoble, 260 postes seront supprimés.
D’autres points noirs : les nouveaux rythmes scolaires dans le primaire sont inadaptés aux élèves. La ségrégation sociale augmente. Il n’y a quasiment pas de rattrapage possible pour les décrocheurs. L’autonomie des établissements se révèle illusoire. Tout cela en raison d’un seul objectif depuis 5 ans : faire des économies.
Objectif raté lui aussi à moyen terme, et c’est grave.
C’est comme ça que l’on aboutit à l’école de l’inégalité des chances.
Nous voulons la transformer en école de la réussite pour tous.
La tâche est vaste ; nous avons les convictions, l’énergie, les compétences, et les idées pour cela.
Je ne citerai que quelques points incontournables pour moi.
– Les enfants doivent pouvoir être accueillis dès 2 ans à l’école maternelle, particulièrement dans le cas de familles en difficulté.
Il n’est pas question de livrer l’école maternelle à la concurrence et aux intérêts financiers privés comme la Droite en a eu la tentation récemment, et comme la majorité trop libérale de l’Union Européenne l’autorise ;
– L’école fondamentale de 6 à 16 ans doit avoir pour objectif l’acquisition d’un socle communs de savoirs fondamentaux et de compétences ; elle doit aiguiser l’intelligence et l’esprit critique de façon à ce que l’élève soit capable de faire des choix pertinents et à s’émanciper. Elle doit éduquer à la citoyenneté, à la coopération plutôt qu’à la concurrence.
– Il est indispensable que les classes ne soient pas trop chargées, qu’un réel accompagnement personnalisé pour les élèves soit mis en place pour le travail scolaire, et d’ordre psychologique si besoin.
C’est le système éducatif qui doit s’adapter à la diversité des élèves, et non pas les élèves qui doivent se couler tous dans le même moule. Il est urgent de mettre en place des pédagogies différenciées pour que chacun réussisse selon ses compétences, et que chaque élève ait une bonne image de lui-même, et qu’il donne une bonne image de lui-même aux autres, moteur essentiel de sa réussite.
L’école pour tous jusqu’à 16 ans, oui, mais avec des pédagogies plurielles !
– Pour stimuler la motivation de chaque jeune, et pour qu’il comprenne l’intérêt de l’école, il est important que celle-ci soit ancrée dans la vie, ouverte sur la culture, l’écologie, le territoire, la cité. Tout simplement intéresser les élèves à ce qu’ils mangent : l’expérience « manger bio à la cantine » s’est révélée très instructive, ou encore, intéresser à l’espace dans lequel ils vivent, par exemple à la consommation d’énergie du bâtiment.
– Pour les lycées : il faut donner un nouveau sens à l’autonomie, revoir les programmes, valoriser les filières professionnelles et technologiques, être capable d’offrir à tout jeune déscolarisé une solution. Souvenons nous que 20% d’une génération quitte l’école sans aucun diplôme. Il faut offrir à ces jeunes une solution de formation, d’apprentissage, d’alternance , ou de service civique.
– Pour les enseignants : une formation pédagogique , initiale et continue, digne de ce nom est indispensable ; c’est une priorité urgente. Il faut revenir sur la réforme récente et valoriser leur métier.
Dès 2012, en négociant avec les organisations syndicales, nous procèderons à un large recrutement d’enseignants et de personnel d’éducation, avec un objectif de 60 000 recrutements en 5 ans.
– Quant à l’enseignement supérieur, il faudra lui donner une nouvelle ambition : la réussite en 1er cycle sera une priorité, ainsi que la pluridisciplinarité, et la personnalisation des parcours. Il faudra revoir la loi LRU et l’autonomie des universités telle qu’elle a été instituée.
– Toutes les catégories sociales doivent pouvoir accéder à l’enseignement supérieur, ce qui implique un soutien aux étudiants par l’instauration d’une véritable allocation d’étude.
– En tant que députée, j’agirai pour que des mesures soient effectives dès la Rentrée 2012, et pour qu’une grande conférence avec les organisations syndicales et tous les acteurs de l’éducation soit convoquée. Elle sera organisée en centre d’intérêts et en différents collèges, et aura pour vocation de définir les lignes directrices d’une reconstruction de l’Education Nationale mise à mal par 10 années d’une politique gouvernementale qui a miné les fondements de l’égalité républicaine.
Je vais me permettre une confidence : j’ai été longtemps enseignante. J’ai beaucoup aimé ce métier. Je suis convaincue que l’Education doit être une priorité nationale, pour notre jeunesse, pour son avenir, et pour le dynamisme de notre pays.